Les différents matériaux de confection des pipes

La pipe est un accessoire hautement sophistiqué qui demande un savoir-faire très pointu. Plusieurs matériaux peuvent façonner une pipe. Celui-ci a un impact tant sur la qualité de la fumée que sur le goût du tabac et la façon de fumer. Dans cet article, vous retrouverez chacun des matériaux et leurs spécificités.

La Bruyère

La Bruyère est une plante robuste, poussant généralement dans le bassin méditerranéen. Il en existe plus de 800 sortes, mais celle utilisée pour fabriquer les pipes est la Erica Arborea. C’est le broussin du rhizome qui est utilisé, car ses qualités sont nombreuses. En effet, il résiste très bien à la chaleur et possède une capacité d’absorption énorme. C’est d’ailleurs grâce à lui que la plante survit, même durant les sécheresses. Même « mort », il continue d’absorber l’humidité du tabac dans la pipe. Il s’en distingue deux parties : l’ébauchon (cœur du broussin) et le plateau (partie extérieure). Les grands maîtres pipiers préfèrent le plateau, mais les deux parties constituent de très belles pièces. Ce bois est très malléable et permet à peu près toutes les fantaisies.

Une fois la pipe effectuée, diverses techniques de finissage sont possibles afin de donner le plus bel effet au brule-gueule : sablage, vernissage, lissage, etc. Le travail des maîtres pipiers se rapproche incontestablement de celui des sabotiers.

En France, les premières pipes en Bruyère ont été fabriquées durant le XIXe siècle, à Saint-Claude et Cogolin. Ce matériau ancestral est toujours celui utilisé pour la fabrication tant artisanale qu’industrielle.

D’autres bois sont utilisés pour confectionner les pipes, comme l’olivier, le merisier ou le buis. Mais il s’agit plus d’œuvres d’art que d’objets quotidiens, car ces bois n’ont pas les mêmes attributs que la Bruyère.

L’argile (aussi dite « terre »)

Les archéologues ont retrouvé des traces de ce qui pourrait être des pipes, durant l’Antiquité. Ces objets portaient le nom de tussilage et étaient fabriqués en argile. Plus tard, au XVII et XIXe siècles, les fumeurs de pipe occidentaux arboraient un brule-gueule en argile. Elles étaient principalement confectionnées à Gouda en Hollande et en Belgique. Mais l’on a retrouvé des exemplaires dans le nord de la France.

La forte résistance de l’argile à la chaleur, en fait un matériau privilégié. Mais encore faut-il que la qualité de l’argile soit parfaite, c’est-à-dire fine et non poreuse, afin de ne pas donner de goût au tabac. Ceci est le cas de la ball Clay. Cela étant, l’argile chauffe rapidement ce qui occasionne parfois des brûlures aux mains chez les néophytes. D’autre part, leur fragilité leur fait grand défaut : le moindre choc peut être fatal. C’est pour cette raison qu’elles sont moins chères que les autres. Aujourd’hui, seuls les puristes utilisent encore ce type de pipes, prétextant que la fumée est la plus pure de toutes. Toutefois, leur fabrication persiste, essentiellement pour l’industrie du cinéma.

La technique de fabrication demande de rouler un morceau d’argile à la main, dans lequel on viendra planter une tige métallique qui façonnera le conduit d’air dans le tuyau. Un moule en métal est ensuite utilisé pour former la tête. Le maître pipier n’aura plus qu’à signer son œuvre, retirer la tige métallique et cuire la pipe dans un four extrêmement chaud (entre 900 et 1 000°C). Le professionnel va ensuite la gratter pour enlever les aspérités. Le maître pipier utilisant la terre ou l’argile, de par ses gestes et sa minutie, se rapproche du métier de potier.

À noter également que certaines pipes étaient confectionnées dans de la porcelaine. Grande favorite des notables du XIXe siècle, la porcelaine était considérée comme une marque de noblesse. Cela étant, la qualité de la fumée ainsi que la température excessive de ce type de pipes, n’ont, par la suite, pas fait bonne réputation de ce matériau. Ces pipes restent très prisées par les collectionneurs.


La pipe en écume de mer

Voici un matériau peu commun. Il s’agit d’un minéral extrait en Turquie (Eskisehir) et en Asie Mineure. Sa texture rappelle celle de l’os de sèche : dure, mais friable. L’écume de mer est extraite, grattée, séchée et grattée à nouveau avant d’être polie à l’aide de cire. Le morceau résultant est alors façonné et sculpté selon les désirs des clients.

Avant de découvrir la Bruyère, l’écume de mer et l’argile étaient les matériaux privilégiés pour la fabrication des pipes.

Le travail du maître pipier est similaire à celui d’un artiste, car souvent, le foyer représente un visage. La qualité du travail effectué est saluée par les collectionneurs qui recherchent ce type de produit. De plus, la coloration de l’écume de mer en dit long sur la qualité de la pipe : si elle a été correctement fumée, elle prendra une teinte dorée. Si celle-ci reste immaculée, cela signifie qu’elle n’aura pas été fumée (donc rarissime) ou qu’il s’agit d’une contrefaçon.

La morta

Il s’agit d’un bois en cours de fossilisation. Sa couleur tend vers l’ébène. Plutôt utilisé pour des lambris, des meubles ou même des manches de couteaux, il est utilisé par les artisans pipiers à cause de sa malléabilité. Il est très résistant à la chaleur et absorbe l’humidité. De plus les fumeurs l’apprécient, car il ne teinte pas les arômes du tabac.

L’épi de maïs

L’épi de maïs n’étant pas difficile à trouver, ce matériau bon marché donne naissance à des pipes à bas prix. Elles sont très utilisées aux États-Unis, car il s’agit du centre de production. Il y en a très peu en Europe.
L’épi de maïs est séché pendant de longs mois avant d’être creusé. Elle est assez rustique, très légère et étant naturelle, sa fumée est pure. Elle est difficile à faire sécher, ce qui fait d’elle une pipe jetable très rentable.


Les autres
matériaux

Au XXe siècle sur le nouveau continent, apparaissent les pipes synthétiques (plastique, graphite pyrolysé, résine phénolique, nylon ou bakélite)

Il existe aussi des brule-gueules en métal (aluminium). Mais celles-ci sont aussi peu répandues. Seule la tête est métallique, la tige reste en bois. Elle chauffe beaucoup et gustativement, elle reste très moyenne. Sa tête amovible est prisée par les testeurs lors de salons, afin de goûter plusieurs tabacs. Certains Asiatiques, Sud-Américains ou même Africains fument des pipes en métal, mais elles sont généralement faites d’argent.